Bordeaux se pose en chef de file de l’innovation de la vigne au vin

La viticulture de demain se prépare aujourd’hui. De jeunes entreprises innovent dans le secteur commercial, dans la protection de la vigne. Ce vent de nouveauté connaît une forte croissance sur la Gironde et dans la région. Soutenu par des structures d’accompagnement et de mise en relation. Innovin, Unitec, Technowest et aujourd’hui le cluster Bernard Magrez participent à cette effervescence.

Un long article paru le 31 décembre 2021 en Espagne (El País, Bordeaux, le Wall Street du vin – par Jesus Rodriguez) situait Bordeaux, dans son modèle économique, comme un centre névralgique du commerce mondial du vin. Quelques jours avant, le ministère de l’Agriculture avait fait paraître « Les grands enjeux de l’agriculture numérique : équipements, modèles agricoles, big data ». L’innovation dans le secteur viticole tient-elle la même place ? Et quelle est la place de Bordeaux ?

Au retour de SITEVI en décembre, force était de constater que les deux médailles d’or attribuées ont été remises à E-Cab et Biophytos, deux entreprises de Nouvelle-Aquitaine soutenues par Innovin.

Quelques jours plus tard, se déroulait à la Cité Mondiale à Bordeaux Innovaday, couplée à Innov’invest, manifestation qui permettait aux start-up de rencontrer des financeurs, avec de nombreuses jeunes pousses tournées vers le monde du vin.

Une effervescence dans le secteur de l’innovation viticole.

Bordeaux dans le secteur de l’innovation à la vigne semblait, voici un peu plus d’une décennie, là aussi, la belle endormie. Force est de constater que depuis ces dernières années, Bordeaux et son vignoble connaissent une véritable effervescence dans le secteur de l’innovation viticole.

Gilles Brianceau, directeur d’Innovin, y voit trois éléments notoires : « Tout d’abord, il y a la prise de conscience du monde viticole face aux enjeux climatiques qui obligent à un nouveau regard. Le monde viticole fait face à une pression sur les produits phytosanitaires. Pression venant des riverains, des clients, brefs, une pression sociétale plus large. » « Les jeunes viticulteurs, et les jeunes sur les exploitations participent aussi à l’usage de l’innovation numérique. Face à l’ensemble de ces éléments, le monde viticole se dit : « On ne pourra plus faire comme avant ». »

En second lieu, l’innovation, « ce n’est pas seulement les start-up. C’est une conjonction d’éléments qui y participent. Nous avons eu des politiques gouvernementales qui ont soutenu l’innovation. Sur ce quinquennat, nous connaissons France Relance. Nous avions eu avant la création de la Banque publique d’investissement (BPI) sur le financement des entreprises innovantes. À l’échelle de la région, plusieurs démarches ont été engagées. Et en ce qui concerne la viticulture, Vitirev a réalisé un fonds d’investissement qui joue un rôle de levier. »

Enfin, ce vent d’innovation est, selon Gilles Brianceau, plus large. « On observe des mouvements entrepreneuriaux dans les écoles de commerce, à l’université. On voit des jeunes avec cette volonté de créer leur boîte. » « Depuis quelques années, c’est encouragé, aidé. C’est un mouvement plus large. Et quand vous êtes à Bordeaux, naturellement on se dit : « Pourquoi est-ce que je ne m’investirais pas dans le secteur du vin ? » »

« Bordeaux se positionne aujourd’hui en leader »

Et surtout, les entreprises naissantes bénéficient d’un réseau d’acteurs prêt à les accompagner : Unitec (sur le territoire de Bordeaux Métropole), Technowest (Libourne), le Technopole Monstesquieu (Marcillac). « Sur le secteur viticole, Innovin accompagne les start-up. Nous avons aussi le devoir de leur montrer que ce n’est pas le miroir aux alouettes. Que des châteaux peuvent aussi les soutenir avec des accords sur des expérimentations. C’est aussi le cas de caves coopératives qui ouvrent leurs portes pour tester. Et sur Cognac par exemple, un groupe comme Hennessy est un acteur important dans l’accompagnement des start-up. »

Gilles Brianceau a maintenant une décennie de recul pour analyser la situation de l’innovation à la vigne et au vin : « En 2011, on dénombrait une trentaine de start-up, essentiellement axées sur la partie commerciale, contre deux ou trois sur la partie viticole. Aujourd’hui, sur le grand Bordeaux, on estime la population de start-up à 60 ou 70. Et avec des profils beaucoup plus diversifiés. Ce peut être la robotique, la logistique, mais aussi l’œnotourisme. Toute la chaîne de valeur est concernée. Ce qui est bien pour la filière. ça bouge, et cela donne des idées. » Et il souligne que l’arrivée en 2020 de l’incubateur Bernard Magrez au Château Le Sartre à Léognan a mis en avant ce foisonnement.

Cependant, Gilles Brianceau se veut mesuré sur cette explosion : « Combien de solutions proposées participent à faire évoluer la filière ? On observe aussi que trop peu de start-up sont issues du secteur de la recherche ou travaillent en relation avec les chercheurs. Nous avons là une meilleure co-construction à faire avec le monde de la recherche. »

Et si le foisonnement est manifeste à Bordeaux, « il faut garder à l’esprit que ça bouge aussi ailleurs. C’est le cas à Montpellier, à Dijon, à Nantes. Et la partie commerciale est très active à Paris, souligne Gilles Brianceau. Bordeaux se positionne aujourd’hui en leader. Et le dynamisme que l’on connaît n’a rien à voir avec ce qui se passait voici 10 ans. J’ose penser qu’Innovin, parmi d’autres acteurs, n’y est pas étranger. D’ailleurs, à notre initiative, nous avons créé ce réseau des clusters et des pôles d’innovation de la vigne et du vin à l’échelle nationale. Nous l’avons baptisé Bacchus. Et nous réfléchissons à des formes d’actions communes pour créer du lien à l’échelle nationale. »

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