Viticulture : les nouvelles aides annoncées par la ministre de l’Agriculture
À l’occasion du salon international SITEVI, qui s’ouvrait officiellement ce mardi 25 novembre à Montpellier, Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, de l’agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire, a annoncé la veille un plan de soutien massif à la filière viticole.
« Ce nouvel effort financier très important, malgré un contexte budgétaire particulièrement difficile et sous réserve de l’adoption d’un projet de loi de finances, témoigne de la détermination du Gouvernement pour sauver durablement notre viticulture et lui permettre de rebondir. Cela passe par un soutien ciblé aux exploitations les plus fragilisées, par l’adaptation de nos dispositifs aux réalités du terrain et par une action résolue au niveau européen. Il ne s’agit pas d’un énième plan d’urgence destiné à corriger un déséquilibre structurel : il s’agit d’un investissement pour redonner un avenir à notre filière viticole et aux agriculteurs de ces zones de production », a déclaré la Ministre par voie de communiqué.
Adapter le potentiel de production
Le plan s’articule ainsi autour de plusieurs mesures :
• Une nouvelle enveloppe de 130 millions d’euros pour l’arrachage définitif
La Ministre a annoncé une nouvelle enveloppe, dotée de 130 millions d’euros pour l’arrachage définitif. Ce nouveau plan d’arrachage définitif «est une mesure structurelle pour aider la filière à mettre en adéquation son potentiel de production et ses capacités de commercialisation et arriver à un équilibre de marché qui permettra de sortir de la crise », a précisé la Ministre lors d’un point presse sur le salon, ce mardi 25 novembre.
Elle répond ainsi à l’un des souhaits de la filière formulé lors de leur précédente rencontre le 6 novembre dernier. Les représentants de la filière avait alors demandé la mise en place d’un programme d’arrachage à hauteur de 200 millions d’euros sur crédits nationaux et européens, ainsi que la relance de la distillation pour évacuer les stocks qui pèsent sur les marchés.
• La prorogation en 2026 des prêts structurels garantis à 70 % par Bpifrance
Face à la situation de la trésorerie qui s’avère critique dans de nombreuses exploitations, la filière avait également demandé la remise en place, au 1er janvier 2026, d’un dispositif de consolidation bancaire réellement accessible, ainsi qu’un soutien renforcée à la prise en charge de cotisations sociales.
En ce sens, la Ministre a confirmé la réouverture en 2026 des prêts structurels garantis à 70 % par Bpifrance (déjà allongés à 12 ans). Comme la Ministre s’y était engagée, ils feront l’objet d’une révision de leurs critères pour mieux refléter les spécificités économiques de la viticulture et seront élargis aux coopératives.
• Allégement des charges sociales
Face à l’urgence, la Ministre avait déjà débloqué une enveloppe de 5 millions d’euros pour la prise en charge des cotisations sociales des viticulteurs au titre de 2025, engagement confirmé ce lundi. Ce premier volet représente un tiers de l’enveloppe nationale prévue pour l’ensemble du secteur agricole au second semestre 2025.
De plus, la viticulture bénéficiera à nouveau d’allégements de charges MSA en 2026 à hauteur de 10 millions d’euros. Les viticulteurs auront également toute leur part dans le dispositif exceptionnel de soutien aux trésoreries, dont le principe a été annoncé à Toulouse le 12 novembre dernier en présence du chef de l’État.
• Activation de la réserve de crise européenne
En complément de ces mesures nationales, la ministre Annie Genevard a demandé au Commissaire européen à l’agriculture et à l’alimentation, M. Christophe Hansen, de mobiliser la réserve de crise européenne. Celle-ci pourrait notamment être mobilisé pour financer la distillation de crise des surstocks non marchands, en priorité pour les caves coopératives.
Des sujets en suspens
« L’État a été constamment présent face à la crise qui frappe le vignoble depuis plusieurs années sous l’effet conjugué du changement climatique, de la baisse de la consommation et de la guerre tarifaire. Il réaffirme aujourd’hui sans ambiguïté son soutien résolu à la filière viticole à laquelle le pays doit tant », rappelle la Ministre dans son communiqué.
Le 6 novembre dernier, lors d’une réunion avec les représentants de la filière viticole, elle s’était engagée à revenir avant la fin du mois vers la filière avec des propositions, se disant « pleinement mobilisée à Bruxelles et à Paris pour apporter des réponses concrètes et sortir notre production viticole de cette crise qui dure depuis trop longtemps. » Suite aux annonces de ce jour, quelques sujets mis sur la table début novembre restent encore en suspens.
Rappelant l’impact de la baisse de production et des aléas climatiques sur l’équilibre économique des exploitations – les volumes réduits fragilisant directement les entreprises – la filière avait demandé l’amélioration des outils d’assurance et la possibilité d’utiliser l’irrigation là où elle conditionne la survie de la vigne. « Le moral des professionnels est au plus bas et de nombreux signaux de détresse remontent du terrain », avaient insisté les organisations réunies autour de la table, rue de Varenne.
À cette occasion, elles avaient également réaffirmé l’importance du Plan de filière national comme cadre d’action commun, celui-ci visant à adapter le potentiel de production, maîtriser les stocks, stimuler l’innovation et redonner de la valeur aux produits. Se sentant freinée par des contraintes échappant à son contrôle (pression réglementaire, coûts en hausse, déconsommation et crises géopolitiques), la filière avait aussi demandé un pilotage politique renforcé pour accélérer la mise en œuvre concrète de ce plan.
Sur le sujet de l’exportation, essentielle à l’équilibre du secteur dans un contexte où la consommation nationale recule et où la filière se trouve confrontée à des risques de mesures de rétorsion suite à des décisions fiscales françaises (« taxe GAFAM » qui vise les géants étrangers du numérique), la filière avait alors demandé que les négociations soient menées au niveau européen afin que la France ne se retrouve pas seule sur le sujet.
La filière avait également alerté la Ministre sur l’incertitude réglementaire concernant des produits indispensables à la protection du vignoble, notamment le cuivre, et demandé un cadre d’usage stabilisé. Elle avait également rappelé l’importance de soutenir les coopératives et de préserver le rôle et le budget de l’INAO, dont dépend la valorisation des signes officiels de qualité.
La Ministre s’était montrée à l’écoute et avait réaffirmé faire de la viticulture l’une de ses priorités majeures. La Ministre avait déjà validé la prorogation du guichet des aides sécheresse jusqu’au 31 décembre 2026, avec une enveloppe dédiée de 10 millions d’euros pour accompagner l’adaptation des exploitations. Elle avait aussi indiqué que le Plan de filière national serait remis au cœur de l’action publique, avec un travail engagé dès les Conférences de la souveraineté alimentaire, le 8 décembre, avant une phase de décisions opérationnelles. La Ministre avait également réaffirmé l’importance du cuivre en viticulture et annoncé des travaux pour sécuriser son usage dans un cadre réglementaire stabilisé.
« Les engagements annoncés vont dans la bonne direction : ils devront être suivis d’effets pour éviter des drames économiques mais surtout sociaux partout sur le territoire français », avaient alors souligné les professionnels de la filière.
* La CNAOC, la Coopération Agricole – Vignerons coopérateurs, le CNIV (Comité National des Interprofessions des Vins à appellation d’origine et à indication géographique), les Vignerons indépendants de France, VinIGP (Confédération des Vins IGP), la FNSEA, les JA.