Emmanuel Macron en soutien à la filière viticole

Samedi 25 février, la filière viticole a échangé longuement avec le Président de la République lors de son passage au Salon International de l’Agriculture. Emmanuel Macron a salué l’engagement de la filière dans son adaptation au changement climatique, et a assuré le « soutien de l’Etat dans la crise que traverse une partie de la viticulture à court et moyen terme, et a cité notamment l’arrachage comme un levier d’accompagnement des exploitations en difficulté. »

Cela fait des mois que le dialogue est ouvert entre Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, et la filière viticole.
Bien souvent, le ministre a fait valoir aux responsables des différents mouvements, exploitants viticoles dans des bassins forts différents : « Revenez me voir avec des propositions ! ». Autrement dit, le ministre a invité les responsables viticoles à faire remonter les idées du terrain. S’engageaient ensuite les études de faisabilité. Et les freins administratifs à lever n’étaient pas forcément minces. Ensuite, restait à envisager les enveloppes financières, les cadres légaux en relation avec l’Europe, mais aussi avec le ministère de l’Économie et des finances.

Bordeaux, 6 décembre 2022. À l’issue d’une manifestation d’importance de la viticulture dans les rues de Bordeaux, la préfète Fabienne Buccio s’était engagée à créer une cellule de crise, et a demandé à la chambre d’agriculture de la Gironde de diligenter une enquête pour dresser un état des lieux.

Bordeaux, 16 décembre 2022. La cellule de crise se réunit une première fois sous l’égide de la préfète. Le communiqué transmis en fin de réunion était sobre : « Plusieurs pistes de solution ont pu être explorées visant à répondre aux différentes situations rencontrées (demandes de diversification de certains viticulteurs, demandes d’arrêt d’activité sans repreneur, situation des propriétaires de vignes non exploitants sans fermier). La préfète a demandé à chacun d’expertiser plus avant les pistes proposées sur la base d’une meilleure connaissance par la Chambre d’agriculture du nombre de viticulteurs susceptibles d’être intéressés par ces dispositifs afin de les calibrer au mieux. »

Bordeaux, 23 janvier 2023. La Chambre d’agriculture a publié les résultats de l’enquête qui avait été menée. Il en ressort sur le bassin viticole bordelais que sur les 3 880 exploitations dont le revenu principal est issu de la viticulture, 1 372 viticulteurs se déclarant en difficultés économiques. Ils représentent 35 000 hectares de vigne. Soit une moyenne de 26 hectares par exploitation. 10 % des déclarants sont déjà engagés dans un règlement amiable, un mandat ad hoc ou une procédure collective au tribunal judiciaire (redressement, liquidation…). Les appellations les plus touchées (à partir des codes postaux des déclarants) sont  le Blayais, le nord du Bourgeais, le Cubzaguais (fortement touché par la grêle), le Fronsadais, une partie du Libournais, le secteur de Castillon, et jusqu’à Sainte-Foy-la-Grande, l’est de l’Entre-Deux-Mers, ainsi que quelques secteurs en Graves et dans le nord du Médoc.
70 % des répondants souhaitent poursuivre une activité agricole et viticole. 300 vignerons envisagent une diversification de leurs activités. L’âge moyen de ce segment est de 47 ans. 23 %, soit 333 vignerons, souhaitent arrêter totalement la viticulture. 98 % signalent ne pas avoir à ce jour de repreneurs. L’âge moyen de ce segment est de 60 ans.

Paris, 6 février 2023. Marc Fesneau réunit rue de Varenne à Paris l’ensemble des représentants de la filière viticole pour dégager les axes prioritaires de travail. Le Languedoc pousse à la distillation, Bordeaux demande des mesures d’arrachage pour permettre une restructuration de son outil de production. La CNAOC défend la mise en œuvre de mesures structurelles (arrachage). Les Côtes-Du-Rhône demandent une prise en considération des deux mesures. Les acteurs de la filière travaillent depuis des mois à des solutions. L’ensemble des outils à mettre en place doit passer par un arbitrage ministériel.
En préambule, le ministre, dans son communiqué, prend en considération la place de la filière : « La filière vitivinicole est majeure pour l’économie française, à la fois dans notre balance commerciale mais aussi pour l’économie de nos territoires. Elle traverse actuellement une crise conjoncturelle dans le contexte d’inflation lié à la guerre en Ukraine qui exacerbe des difficultés structurelles dans certains bassins viticoles et couleurs de vins. »

Distillation de crise et mesures d’arrachage

Sur la partie conjoncturelle. Le ministre apporte des précisions : « L’État accompagne la filière dans la mise en œuvre de mesures de gestion de crise, permises au travers de l’Organisation Commune des Marchés du secteur vitivinicole. Dès à présent, et dans la limite des montants autorisés par les dispositions européennes, ce sont 40 millions d’euros de crédits nationaux, complétés de 40 millions de l’enveloppe de financements européens (FEAGA) dédiée au secteur vitivinicole, qui permettent d’engager dès cet été une campagne de distillation. Une seconde campagne de distillation pourra être organisée à partir d’octobre selon la même répartition entre crédits nationaux et européens pour atteindre un maximum de 160 millions d’euros en 2023. Les demandes seront portées en ce sens auprès de la Commission Européenne sans délai. » Sur ce point, il n’est pas décidé à ce stade de montants spécifiques en fonction des catégories de vins (AOC, IGP ou VSIG).

Prêts garantis par l’État. « Pour répondre aux difficultés de trésorerie rencontrées par nombre d’entreprises, le gouvernement a prolongé jusqu’à la fin de l’année 2023 l’accord de place sur les restructurations de Prêts garantis par l’État (PGE) dans le cadre de la Médiation du crédit aux entreprises. Ce dispositif, qui peut permettre à une entreprise de rééchelonner son PGE, est rapide, gratuit, confidentiel et non judiciaire. »

Arrachage. À cette date, les modalités ne sont pas arbitrées même si elles sont évoquées (lire par ailleurs pages 10 et 11). Et Marc Fesneau renvoie à une solution de terrain en précisant : « Une réflexion autour de mesures structurelles est aussi en cours dans certains bassins viticoles, comme dans le Bordelais où le Préfet a monté une cellule de crise. Des pistes sont à l’étude autour de la mobilisation des outils du Feader sur la diversification agricole, du renouvellement de générations et de l’arrachage sanitaire dans le cadre d’un programme interprofessionnel d’enrayement de la flavescence dorée. Le travail doit se poursuivre pour que ces leviers puissent être rendus opérationnels dès 2023. L’État sera aux côtés de la Région Nouvelle-Aquitaine et de l’interprofession bordelaise pour répondre ensemble aux enjeux. »
Au sortir de la réunion, Stéphane Héraud, président de l’association générale de la production viticole (AGPV), déclare : « Ces éléments sont une première réponse. Si la mobilisation doit se poursuivre sur le sujet des PGE et pour l’obtention de crédits complémentaires auprès de la Commission européenne pour la distillation de crise, il faut également continuer à travailler sur les questions d’adaptation des superficies en production pour les régions en difficulté qui portent des demandes de soutien à un arrachage rapide ».

Bordeaux, 8 février 2023. Étienne Guyot, nouveau préfet de la région Nouvelle-Aquitaine, réunit la cellule de crise. Ancien préfet d’Occitanie, l’homme assure de sa volonté de travailler avec la filière viticole. Au sortir de cette réunion, il est fait état des avancées de la rencontre avec le ministre et il est apporté la précision suivante : « Ces mesures doivent faire l’objet de précisions techniques dans les meilleurs délais par le ministère pour leur mise en œuvre. »

« Nous travaillerons aussi un plan stratégique à l’export »

Paris, lundi 13 février 2023. Lors de l’inauguration de Wine Paris-Vinexpo Paris, Marc Fesneau s’avance à la tribune. « Le gouvernement est à vos côtés pour mener des mesures conjoncturelles et des mesures structurelles. » Il évoque la distillation.
« Deuxième élément, nous avons besoin de travailler l’arrachage. Pour repartir à l’offensive, il faut réguler certaines productions. C’est-à-dire assainir pour repartir. Travailler des mesures défensives ne nous empêchera pas de travailler sur l’offensif, et notamment à l’export. Il faut aussi travailler au renouvellement des générations. L’État sera à vos côtés, et nous travaillerons aussi sur un plan stratégique à l’export. »
Sur le PGE, en marge de son discours inaugural, le ministre apporte la précision suivante : « Nous ne pouvons pas avoir de mesure générale. Mais nous mettons en place au ministère une cellule dédiée qui sera interpellée au cas par cas sur les mesures d’étalement du remboursement du PGE, le tout pour éviter des mesures d’inscription au fichier Banque de France. »

Les responsables de la filière viticole en discussion avec le ministre Marc Fesneau à l’issue de l’inauguration de Wine Paris-Vinexpo Paris. (Photo Xavier Remongin / agriculture.gouv.fr)

Paris, 25 février. Emmanuel Macron, Président de la République, rencontre l’ensemble des représentants de la filière viticole. Il a « assuré du soutien de l’Etat dans la crise que traverse une partie de la viticulture à court et moyen terme, et a cité notamment l’arrachage comme un levier d’accompagnement des exploitations en difficulté. Il a également indiqué avoir demandé au gouvernement d’être attentif au remboursement des PGE pour les secteurs fragilisés, notamment la viticulture. »

E.D.

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