Terra Hominis : Bordeaux se partage

« Marre du Bordeaux Bashing. vive le Bordeaux Loving ! » C’est avec ce cri du cœur que Ludovic Aventin, fondateur de Terra Hominis, présente les activités de de crowdfunding de sa société. Laquelle permet à des domaines en quête de développement de trouver des actionnaires rétribués en bouteilles de vin. Plusieurs exploitations de Gironde y ont eu recours avec succès.

Ludovic Aventin, fondateur de Terra Hominis

En 2011, Ludovic est caviste à Rouen et ambitionne un jour d’avoir son propre vignoble. Devant les difficultés financières rencontrées pour s’installer en tant que vigneron, il décide de faire appel à des amis pour l’aider à concrétiser son rêve. Grâce au financement participatif de plus d’une centaine d’associés, son désir devient réalité avec la reprise d’un vignoble en AOC Faugères. De cette première expérience, va naître l’idée du projet Terra Hominis : « J’ai voulu promouvoir ce modèle vertueux qui consiste à concilier le crowdfunding (financement participatif) et l’aventure humaine collective afin d’aider des jeunes vignerons à s’installer ou à développer leur vignoble. »

L’histoire est belle et, dix ans après, a fait des émules. Grâce à 3 200 associés, plus de 44 projets viticoles en copropriété ont été lancés, dont 5 réalisés et 2 à venir prochainement dans le Bordelais. Bordeaux reste le vignoble le plus désirable  pour les consommateurs français et pour des associés qui touchent du doigt le rêve de devenir (co) propriétaire d’un « Château ».

« Je crois beaucoup en Bordeaux et à cette jeune génération de vignerons, ouverts d’esprit, prêts à casser les codes et respectueux de l’environnement », ajoute avec enthousiasme et optimisme Ludovic Aventin. D’ailleurs, Terra Hominis cherche avant tout à promouvoir une viticulture engagée dans les démarches environnementales. Ce n’est donc pas un hasard si Bordeaux, avec 75 % des surfaces sous certification, séduit autant d’associés originaires des quatre coins de France.

En 2019, Terra Hominis est devenue la première « société à mission » du monde viticole avec un objectif affiché de contribuer à la sauvegarde du patrimoine français. Son fondateur est clair : « Il ne s’agit pas d’un placement financier. Une part se valorise en moyenne à 1500 € avec un rendement de 4,5 % payé exclusivement en bouteilles. Pas de quoi faire fortune ! » Le but est aussi de garantir l’indépendance des vignerons qui assument seuls leurs responsabilités liées à la gestion et aux investissements sur la propriété. La prise de risque est ainsi limitée pour des associés motivés avant tout par l’aventure humaine. Régulièrement, ils se retrouvent pour les vendanges, une mise en bouteilles ou la création de leur propre cuvée. Autant de moments de partage et de convivialité qui leur offrent l’opportunité de découvrir le métier de viticulteur.

Côté vignerons, Terra Hominis permet de se passer de banque, mais pas seule- ment. La structure propose aussi un ac- compagnement juridique, marketing ou commercial. « Nos vignerons sont complé- mentaires. On fait attention à la représen- tativité des différentes régions et AOC dans le développement de Terra Hominis. Les associés d’un vigneron deviennent souvent les clients d’autres vignerons que nous ac- compagnons », ajoute Ludovic.

Et demain ? La volonté est de  soute- nir encore davantage les vignerons dans leur développement. À l’étude, l’idée de financer un espace collectif sur des sa-

lons professionnels fait son chemin. Alors rendez-vous est pris l’an prochain à Wine Paris sur le stand aux couleurs de Terra Hominis.

En attendant, 3 vignerons bordelais par- tagent avec nos leur expérience de l’entre- prise de vignobles en copropriété. Leurs points communs? L’envie de promouvoir l’image d’un Bordeaux accessible, moderne, dynamique et engagé.

David Arnaud – Château Tour des Graves – AOC Côtes de Bourg

David Arnaud, installé en Côtes de Bourg

Il est le premier vigneron bordelais à avoir franchi le pas du financement participatif avec Terra Hominis. En 2015, David Arnaud sollicite la SAFER afin de faire grandir sa propriété de 20 ha à Teuillac via l’achat de 6 ha supplémentaires. 3 ans plus tard, à la fin de la période de portage, il se tourne vers Terra Hominis pour rache- ter les vignes et lui éviter ainsi la pression financière liée à un crédit bancaire. 5e génération de vigneron, David s’est d’abord heurté au scepticisme de son entourage à l’idée de « lâcher des vignes de la propriété familiale à des étrangers ».

« Terra Hominis m’a d’abord permis d’agrandir mes surfaces (32 ha aujourd’hui) puis de passer en conversion biologique en 2018 avec un second projet participatif. Aujourd’hui, j’ai 200 associés qui sont là par passion et pas seulement par intérêt spéculatif », avoue le vigneron, heureux de se consacrer pleinement et sereinement à son métier. En ayant le sentiment d’être épaulé dans son travail par ces « bons samaritains », il tente, innove et fait bouger les lignes en proposant régulièrement à ses associés et aux autres de nouvelles cuvées. Vendre ses vignes pour s’acheter une liberté en quelque sorte.

Convaincu du bien-fondé de la démarche, David Arnaud fera quelques années plus tard du prosélytisme pour ce modèle de développement en présentant à Ludovic Aventin une de ses amies vigneronnes, Marion Reculet.

Marion Reculet – Château Le Camplat – AOC Blaye Côtes de Bordeaux

Marion Reculet, en bio grâce à 115 associés.

En 2014, Marion Reculet, alors âgée de 34 ans, décide de reprendre les rênes du vignoble familial de 17 ha sur la commune de Saint-Mariens, dans le Blayais. Soucieuse de pérenniser le travail de son père, elle souhaite également donner un nouvel élan à la propriété et convertir le vignoble en agriculture biologique.

« Pour moi, c’était important de passer en bio. J’ai donc décidé de faire appel à Terra Hominis, en 2019, pour m’aider à faire face aux investissements nécessaires à la conversion. Entre l’outillage et les ressources humaines nécessaires, je n’aurais pas pu financer seule ce surcoût », témoigne-t-elle. Fière de prolonger l’histoire familiale, elle peut maintenant compter sur 115 nouveaux membres dans la famille, des associés qui ont participé à un projet de rachat de 4 ha de vignes.

Ce choix stratégique s’avère aussi payant au niveau des ventes. « C’est un formidable réseau d’ambassadeurs qui ont à cœur de porter haut les couleurs de la propriété. Ce fut ainsi un vrai second souffle commercial, surtout pendant la période du covid où tous les salons étaient annulés », insiste Marion. Alors que la propriété était très dépendante du marché du vrac avant son arrivée, la vigneronne capitalise sur ces prescripteurs de choix pour accélérer

le développement de la vente en bouteilles aux particuliers mais aussi aux professionnels, comme les amis d’associés, cavistes ou restaurateurs.

Rémi Lamerat – Château Grand Jour – AOC Côtes de Bordeaux

Rémi Lamerat engage sa reconversion à la vigne.

Rugbyman professionnel, ce passionné de vins âgé de 32 ans prépare sa reconversion et envisage sa seconde vie de néo-vigneron bordelais avec enthousiasme et exigence. Pour l’aider dans cette nouvelle aventure, il s’est tourné vers Terra Hominis afin de se porter acquéreur d’une propriété de 10,8 ha à Yvrac. « Quand j’ai été champion de France de rugby en 2013,  j’ai promis à mes collègues qu’on fêterait ça dans 10 ans sur ma propriété viticole. On y est! »

Originaire de la région bordelaise et armé d’un diplôme de BTS viti-oeno obtenu récemment, le jeune homme déborde d’idées pour relancer une propriété peu porteuse commercialement. Vente en circuits courts, rénovation des bâtiments pour développer l’œnotourisme, plantation de cépages résistants, vinification en amphore, cet ancien international tricolore qui foule encore les pelouses avec l’UBB (son contrat se termine en juin 2023) a trouvé de nouveaux défis à relever. « J’ai envie de contribuer à ce renouveau des vins de Bordeaux et de faire partie de cette nouvelle génération de vignerons engagés dans leur vignoble », ajoute ce jeune homme plein d’entrain.

Avec humilité, il avoue qu’il souhaite renoncer à la mention Château pour lui préférer celle de Domaine. Une chose est sûre, il continuera de jouer collectif avec les 125 associés qui ont rejoint son projet en ce début d’année 2022.

Mickaël Rouyer

Plus d’infos : https://terrahominis.com

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